Irak : Le "Raïs" Ahmadinejad en terrain conquis

Publié le par Hervé Pugi

C'est en terrain conquis que le président de l'Iran, Mahmoud Ahmadinejad, s'est rendu en Irak aujourd'hui. Alors que les deux géants de la région se sont livrés à une guerre meurtrière durant huit ans qui n'a connu ni vainqueur ni vaincu (mais entre 600000 et 1200000 morts), l'insupportable président iranien a réussi le tour de force "d'envahir" son voisin sans coup férir et en toute tranquillité. Son arme secrète ? L'armée américaine.
Et oui, le meilleur allié de Téhéran a été sans discussion possible George Bush et son administration. Non seulement, l'armée US a liquidé l'ennemi numéro un, Saddam Hussein, mais aussi remis au pouvoir des dirigeants chiites qui sous le régime baasiste n'ont eu de cesse que de trouver refuge... en Iran. 
Mieux, l'occupation américaine du pays, toujours aussi mal vécu par les populations civiles, est un pain béni pour le régime des mollahs qui n'a de cesse de faire la pluie et le beau temps en finançant et armant la résistance irakienne. De ce fait, non seulement Mahmoud Ahmadinejad joue avec les nerfs de Washington mais il manipule à la perfection un voisin qu'il n'a pas intérêt à voir se relever et se développer trop vite. Surtout grâce aux investissements occidentaux. L'Iran est pour l'Irak ce que le Syrie est pour le Liban ou le Pakistan pour l'Afghanistan. Un pouvoir parallèle qui -par la pratique d'une diplomatie souterraine- a autant de pouvoir de décision, mais surtout de nuisance, que les autorités de Bagdad elles-mêmes. 
Quid de l'avenir ?
Alors, il ne faut pas se fier aux beaux discours du leader iranien lorsqu'il souhaite "un Irak puissant, développé et prospère". Un tel avenir pour Bagdad ne dépend que du bon vouloir de Téhéran. M. Talabani, le président de l'Irak, le sait bien. Lui qui a demandé à son ami Mahmoud de l'appeler "Mam", oncle en Kurde. Ahmadinejad aurait pu pour sa part lui demander de l'appeler "Raïs" comme le défunt dictateur Saddam Hussein...
La grande question de cette visite historique est bien de savoir quelle sera l'attitude des dirigeants irakiens lorsque les "occupants" auront libéré la place. Car les jours de l'armée américaine en Irak sont comptés. Une fois Bush rentré dans son ranch texan, il est inimaginable que le nouveau président ne présente pas un plan de retrait rapide de ce bourbier. Les occidentaux partis, quid de l'avenir de l'Irak ? Le pouvoir en place saura-t-il assurer sa souveraineté ou succombera-t-il aux pressions et aux chantages d'un voisin aux dents longues qui nargue la communauté internationale et travaille toujours à se doter de l'arme atomique ?
Autant dire que les prochains mois vont être décisifs pour l'avenir de l'Irak mais pas seulement. Se retirer militairement est une chose, abandonner ce pays en serait une autre. Tourner la page d'un tel conflit du côté de Washington ne doit pas mener à estimer que le livre touche à sa fin. L'histoire de la nouvelle Irak n'en est qu'à son premier chapitre. Il ne faudrait pas que le prochain soit lui aussi écrit d'une plume trempée dans du sang...

 

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